Sain, direct et local
Un texte de Denis Lord
Paru dans le numéro Printemps/Spring 2017
Publié le : 10 mars 2017
Dernière mise à jour : 1 novembre 2020
Aux légumes bios de Brome-Missisquoi s’ajoutent depuis peu champignons et produits de boulangerie. Mycotrophe et Capitaine Levain ont eux aussi choisi un modèle d’affaires basé sur la proximité, la santé et la vente directe. Au moment de notre rencontre, en automne dernier, Nicolas Van Caloen venait de vendre son premier 1000$ de shiitakes. Une étape…
Aux légumes bios de Brome-Missisquoi s’ajoutent depuis peu champignons et produits de boulangerie. Mycotrophe et Capitaine Levain ont eux aussi choisi un modèle d’affaires basé sur la proximité, la santé et la vente directe.
Au moment de notre rencontre, en automne dernier, Nicolas Van Caloen venait de vendre son premier 1000$ de shiitakes. Une étape importante pour son entreprise, Mycotrophe, qui depuis a reçu 2 subventions importantes : une de la Financière agricole du Québec (FADQ) et une autre du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). Plus récemment, Nicolas obtenait ses premières récoltes de production intérieure et s’affairait à la préparation de la saison 2017.
L’entreprise Mycotrophe fait partie du collectif Espaces (Écologie sociale, Permaculture, ACcès à la terre, Économie Solidaire), qui, par le biais de l’habitation et de l’agriculture, prône des principes de développement durable en économie, en environnement et en santé. Selon Nicolas Van Caloen, économiste de formation : « La production est un des moyens, trop souvent sous-estimé, par lequel on construit la société dans laquelle on vit. Dans cette optique, la manière selon laquelle on organise la production crée des rapports sains ou malsains pour la société et l’environnement. »
Van Caloen s’est particulièrement intéressé au mouvement coopératif en Argentine où, explique-t-il, le mode de gestion permet aux citoyens de se réapproprier les moyens de production, mais aussi les profits et objectifs de l’entreprise. S’inspirant de ce modèle, Mycotrophe deviendra une coopérative de travail où tout le monde pourra s’impliquer dans le processus décisionnel. En attendant, l’entreprise est axée sur la localisation et l’écologisation de l’économie, ainsi que la diversification de la production.
Genèse
Diversification donc. Mycotrophe se décline en trois volets : la production de champignons gourmets, médicinaux, et la mycorémédiation, c’est-à-dire la décontamination de sols ou de résidus pétroliers par exemple. À la longue, la mycorémédiation sera une plus grande source de revenus, estime Nicolas Van Caloen. Cette approche peut coûter le tiers d’une décontamination traditionnelle, mais la méthode est encore au stade expérimental.
Nicolas Van Caloen a inoculé trois tonnes de billots en production extérieure. On retrouve notamment trois sortes de shitakes et tout autant de pleurotes, du lion’s maine, des strophaires rouge vin, du maitake. « Il y a une diversification et une curiosité pour le champignon comme il y en a eu pour le pain et la bière, » observe le maître d’oeuvre et unique employé de Mycotrophe. M. Van Caloen parle avec enthousiasme de l’esprit de partage qui règne dans la Mushroom society, où l’échange de savoirs dépasse de beaucoup la compétition. Il entend à son tour, un jour, transmettre ses acquis.
Partenariats
Le modèle d’affaires de Mycotrophe est basé sur la vente avec un intermédiaire au maximum et dans un rayon limite d’une heure trente du lieu de production. On parle entre autres de marchés, de points de chute, de restaurants. Des associations sont en gestation avec des joueurs locaux de l’agroalimentaire. La drêche – un sous-produit de la fabrication de bière – peut servir à enrichir les substrats des champignons, qui, par ailleurs peuvent entrer dans la confection de divers aliments.
Pour obtenir plus d’informations, veuillez contacter Nicolas au 450-263-2722 ou sur sa page Facebook Mycotrophe.
Levain de l’est
Le Sire Dodu, le Caporal 4 heures, le Fier Gaulois et tutti quanti : à la boulangerie Capitaine Levain, on ne manque pas d’imagination pour nommer les produits. On sait aussi ce qu’on veut. « J’ai une manière de faire le pain et personne ne le fait comme je veux, affirme Ghislain Despatie. » Le jeune homme dénonce l’utilisation abusive et désubstantialisante du mot artisanal. Cette manière de faire le pain, c’est, on s’en doute, de privilégier des ingrédients sains et peu communs comme le levain et aussi le kamut et l’épeautre, cultivés bien sûr, sans pesticides (mais pas encore certifiés bio).
Ghislain Despatie a ouvert sa boulangerie à Stanbridge East en février 2016. Il travaille à accroître l’utilisation de produits locaux, actuellement modeste. Il utilise les zucchinis d’un maraîcher local, troqués contre des pains, envisage également de cultiver d’anciennes variétés de blé européen dans un objectif d’autosuffisance. En Europe, note la copropriétaire de l’entreprise, Céline Richard, la tradition veut que le boulanger soit aussi meunier et agriculteur.
Une manière de faire le pain, une manière aussi de commercer. « Nous sommes en lien direct avec nos clients, explique Ghislain Despatie. On les connaît et on s’accommode de leurs demandes en termes de formats et de produits. Je leur écris, je réponds vite à leur courriels, c’est ce qu’ils veulent. Ça fait des clients fidèles. »
Distribution
La vente des produits de boulangerie de Capitaine Levain s’articule essentiellement sur des précommandes et des paniers hebdomadaires, ce qui, dit M. Despatie, permet grandement de diminuer les pertes. Les gens peuvent, entre autres, commander par Internet et aller chercher les produits à Sutton, Dunham, Frelighsburg et Cowansville. Leur boulangerie sert également de point de chute. On peut garder le prix plus bas en travaillant à la maison. Ghislain Despatie et Céline Richard ont en outre mis au point des partenariats avec plusieurs maraîchers de la région, ce qui rend leur pain disponible dans paniers livrés jusqu’à Montréal.
Comme pour Mycotrophe, chez Capitaine Levain, le commerce et la production s’inscrivent dans un cadre plus vaste : on travaille à garder des produits sains à un prix accessible. «Nous travaillons beaucoup, ajoute Ghislain Despatie, mais nous avons de la flexibilité dans nos horaires et les enfants sont là avec nous. Ça nous offre une bonne qualité de vie, un mode de vie qui correspond à nos valeurs. Pour plus d’informations, visitez www.capitainelevain.ca.