Le Clos de l’Orme Blanc
Un texte de Noël Masseau
Paru dans le numéro Été/Summer 2021
Publié le : 18 juin 2021
Dernière mise à jour : 18 juin 2021
Le Clos de l'Orme Blanc vaut bien une visite. Si vous n'aimez pas les vins, passez au moins voir la magnifique grange à livres du vignoble. Un endroit magique!
Lorsqu’ils sont tombés sous le charme de l’endroit en 2009, Lucie Debien et Rino Dumont ne se doutaient pas qu’ils s’apprêtaient à entamer une nouvelle carrière. Les deux ingénieurs cherchaient plutôt à dénicher un coin de campagne tranquille. Situé sur le chemin Dutch à Saint-Armand, l’ancien vignoble de la Sablière avait été abandonné en 2004. Les bâtiments étaient en mauvais état, mais les vignes continuaient d’être entretenues par des vignerons de la région qui en louaient les parcelles. Ils ont donc passé les cinq premières années à rénover eux-mêmes les bâtiments tout en s’occupant de la vigne.
Comme ils prenaient goût à la viticulture, ils ont suivi quelques cours. Ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’est que ce soit aussi stimulant. « L’ingénierie, c’est de la résolution de problèmes à l’aide de connaissances scientifiques. Et la viticulture, c’est pas mal ça aussi… » résument-ils.
Depuis 2019, le Clos de l’Orme Blanc est officiellement sur la Route des vins. Cette année-là, les propriétaires ont réussi à sortir 2500 bouteilles, une toute petite production. En 2020, ils en ont sorti 3500 qui se sont envolées en un rien de temps. D’ici 3 ans, c’est le double qui devrait se retrouver sur le marché.
Le génie dans la bouteille
Pour leur production, Lucie et Rino comptent sur quatre cépages blancs répartis sur deux hectares : Seyval, Geisenheim, Pinot gris et Savagnin. Un choix assez original au Québec puisque seul le Seyval y est exploité depuis les débuts de la viticulture. De plus, du quatuor, c’est le seul qui n’est pas un cépage dit noble (vitis vinifera).
Identité 2020
Ce vin se compose à 100 % de seyval. Il affiche une belle maturité, une fraîcheur absolue, sans agressivité. Un fruité évoquant la pomme verte assorti d’une subtile touche florale. Il présente une longueur et une rondeur pas si fréquentes pour ce cépage. Impeccable, il ne peut que plaire à ceux qui aiment les blancs droits et francs.
Au pied de la lettre 2020
Cette autre cuvée est issue du même cépage, est produit avec des raisins récoltés légèrement plus tard et ayant fait l’objet d’une fermentation malolactique partielle. Il présente sensiblement les mêmes caractéristiques avec encore plus de corps et de maturité. Des jumeaux, mais non identiques, à déguster côte à côte dans quelques mois.
Le mot dit 2020
Un vin fait de Pinot gris, cépage qui a permis de tirer un vin aux dimensions modestes pour le moment, l’âge moyen des vignes n’étant que de trois ans, mais vraiment prometteur et déjà charmeur à souhait. Un petit délice qu’on déguste sans se poser de question. Il sera vraiment intéressant de suivre son évolution au fil de la maturation des vignes.
Conte d’Armandie 2020
Ce vin ne sortira que plus tard cette année. Un assemblage à majorité de Geisenheim, cépage d’origine allemande peu exploité au Québec, et de Seyval. Doté d’une robe franchement dorée, c’est le plus explosif au nez avec des notes rappelant le fruit de la passion et le litchi. La bouche, plus retenue, est agréablement fruitée et fraîche. Il prendra du volume et de la densité avec le vieillissement des ceps.
Les vignes porteuses du cépage Savagnin, fierté du Jura et source des vins jaunes de cette région, n’ont pas encore produit une récolte digne de ce nom, mais elles devraient le faire d’ici quelques années. Donc patience !
Notez que les vins de ces scientifiques méticuleux peuvent être qualifiés de vins naturels, voire nature, parce qu’ils sont vinifiés sur levures indigènes, non filtrés ni collés. Les vignes qui les produisent sont traitées sans recours aux produits chimiques.
Le génie de la grange à livres
Dans une grange derrière le chai, les propriétaires ont magnifiquement aménagé… une bibliothèque ! On y trouve plus de 12 000 livres judicieusement classés par nos deux ingénieurs qui n’en sont pas peu fiers. Voilà pourquoi les noms de leurs vins ont tous des connotations littéraires. Ici, pas d’infrastructures pour accueillir de grands groupes. Le dada des propriétaires se résume à accueillir les gens dans un endroit paisible qui invite à la promenade, au pique-nique et à la lecture !
Ce qui relève du génie ? Les livres, entreposés dans la grange à l’année, sont parfaitement conservés ! Et l’ambiance ! On entre dans la grange en traversant de minces rideaux diaphanes comme dans un rêve. L’éclairage naturel du jour entre les planches, jumelé à un éclairage artificiel réfléchi, crée une ambiance hors du temps. Des photos du vignoble et une murale d’art naïf dans le faîte du toit nous rappellent où nous sommes. Et quand vous tombez sur un livre envoûtant, vous pouvez le prendre avec vous. L’idée se résume à empruntez, dégustez, rapportez…
On vous suggère fortement une visite au vignoble! Les sympatiques propriétaires ont gardé quelques bouteilles pour les gens de passage. Autrement, à l’heure où vous lirez ceci, leurs bouteilles se seront sûrement déjà envolées sur les tablettes de quelques épiceries fines et dans les restos branchés comme le H3 à Montréal. Normalement, la grange à livres ouvre ses portes aux passants les weekends dès le mois d’avril. Le vignoble, lui, ouvrira le 24 juin si les mesures sanitaires le permettent. Pour plus de détails, consultez closdelormeblanc.com.
Noël Masseau et Geneviève Hébert