Ewa Scheer : de l’importance de l’art

Un texte de Andrée Pelletier

Paru dans le numéro

Publié le : 8 novembre 2024

Dernière mise à jour : 8 novembre 2024

 

Forte d’études en philosophie, en psychologie et en arts visuels, Ewa Scheer commence ses toiles en sachant bien ce qu'elle cherche à exprimer.

Elle habite tout en haut d’un petit chemin plus ou moins carrossable dans une maison magnifique, assise sur un gros rocher. Son atelier est vaste et bien éclairé, nous nous asseyons sur un petit canapé avec une tasse de thé et des friandises polonaises, car Ewa Scheer est née en Pologne. Elle est toute petite et semble à peine pouvoir contenir toutes les idées qui bouillonnent en elle. Élevée sous un régime communiste, elle me dit tout de suite qu’elle ne croit pas aux classes sociales, « nous sommes tous égaux », me dit-elle. Et nous voilà parties. Nous parlons de l’importance de l’art, de la beauté, de la qualité, des temps dans lesquels nous vivons et à travers tout cela, de son art. Elle a besoin que son travail documente, qu’il porte un sens précis. 

Ewa Scheer
Série Beautiful Organ, crayon de graphite sur papier, 30 x 22 po.

Trouver du sens

La plupart des artistes que j’ai eu la chance de rencontrer commencent une toile sans savoir vraiment où le pinceau les mènera, ce n’est pas le cas avec Ewa. Forte d’études en philosophie, ainsi qu’en psychologie et en arts visuels, ce qu’elle veut dire par sa toile est bien clair dans sa tête avant que le crayon ne commence son esquisse. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne cherche pas à tâtons la forme finale de l’œuvre.

À douze ans, elle est initiée aux arts par sa tante qui travaillait dans un musée et qui la laissait seule se promener à travers les salles, alors que le musée était fermé. Elle y rencontre de grands peintres. Incapable d’entrer à l’École des Beaux-Arts qui n’accepte que très peu d’étudiants par année, elle se penche vers la philosophie, ainsi que la psychologie, puis la photographie. Ne voyant aucun débouché dans son pays, elle immigre au Canada. 

Ewa Scheer
Night Skiing, 2023, crayon de graphite sur papier, fragments de photo, acrylique sur bois, 40 x 30 po.

Capturer et documenter la beauté

Ewa Scheer est une artiste multidisciplinaire. Un volet de son travail s’intéresse au portrait. Elle transforme ses sujets en personnages du 18e siècle ou autre, tout en gardant les yeux, une main ou quelque autre partie d’une photographie prise au préalable. Son portrait se veut un hommage à la photographie, ainsi qu’une documentation de l’existence de son sujet.

L’autre volet de son travail se caractérise plutôt par une exploration du monde naturel, en particulier de son impermanence, à travers la photographie et l’installation. Elle s’intéresse aux qualités éphémères de l’eau, de la lumière et des matériaux organiques, cherchant à capturer la beauté évanescente du monde qui nous entoure.

Ewa Scheer
Blue Veins, série Météographies, pigments non-toxiques sur glace, Diasec sur aluminium

Explorer l’impermanence

L’une de ses séries les plus reconnues est celle des Météographies, un travail sur la glace en forêt. Dans ces projets, elle utilise des pigments sur des formes figées, créées par l’eau, qui se forme auprès de sources naturelles, pour évoquer un lien profond entre l’œuvre d’art et son environnement. Une fois la glace fondue, il ne reste que l’enregistrement photographique de la pièce, mettant l’accent sur les thèmes de l’impermanence et de la transformation. Ce procédé met en valeur le caractère impermanent de la nature, incitant le spectateur à réfléchir sur la fragilité des écosystèmes et les changements qu’ils subissent au fil du temps.

« L’art nous inspire, nous transporte » me dit-elle et je sens qu’en quelques mots, elle me résume sa vie. Et je me demande comment en si peu de mots je réussirai à transmettre toutes les idées et surtout la flamme qui habitent cette femme. Vous aurez l’occasion de la rencontrer lors du Tour des Arts 2025. L’expérience en vaut la peine, je vous la recommande chaudement. D’ici là, visitez www.ewascheer.com.