L’accessibilité des milieux naturels
Un texte de Anthoni Barbe
Paru dans le numéro Printemps/Spring 2024
Publié le : 27 février 2024
Dernière mise à jour : 27 février 2024
La conservation et l’accessibilité des milieux naturels constituent un important défi en milieu privé dans Brome-Missisquoi.
La conservation et l’accessibilité des milieux naturels constituent un important défi en milieu privé. La municipalité de Sutton fait figure d’exemple avec le Parc environnement naturel Sutton (PENS). Pourtant, quand on regarde le portrait de la MRC Brome-Missisquoi, on constate que les efforts de conservations et d’accès à la nature sont très inégaux. Au point où il semble que les vrais bons élèves de la région semblent surtout être au sud de la frontière.
Brome-Missisquoi : accessible ou pas ?
Comme le nez au milieu du visage, protéger les monts Sutton, les plus hauts de la région, semblait être une évidence. Pourtant, il existe de nombreux milieux naturels dans la région qui mériterait d’être protégé : les rives de cours d’eau, de vastes portions de forêts, de petites montagnes moins connues.
Ces milieux naturels constituent le patrimoine régional et pourtant, l’accessibilité reste difficile. Frelighsburg fait figure d’exception avec ses sentiers FR1 et FR2 qui sillonnent la municipalité complètement gratuitement. La question se pose donc : qu’attendent les municipalités environnantes pour mener de tels projets ? Quand pourrons-nous marcher d’une municipalité à l’autre dans Brome-Missisquoi ?
Vermont, exemple d’accessibilité
Le Vermont est un cas unique duquel la région gagnerait à s’inspirer. En effet, la grande majorité des montagnes du Vermont sont accessibles gratuitement bien qu’elles soient en milieu privé pour la plupart. Plusieurs itinéraires de longues randonnées, tout autant gratuits, permettent de traverser l’État sur plusieurs dizaines de kilomètres. Des clubs locaux gèrent la plupart de ces sentiers qui existent parfois depuis plus de 100 ans.
Cette situation est toute l’inverse du modèle actuellement en place dans la région, où il faut payer pour accéder aux parcs, en plus de payer pour accéder aux Sentiers de l’Estrie, la seule option de longue randonnée dans la région. Est-ce que les propriétaires terriens du Vermont auraient un sens plus développé de l’intérêt collectif que ceux de Brome-Missisquoi ? Ou peut-être ont-ils des leaders plus proactifs dans le domaine ?
Nouveaux propriétaires farouches
Quand on aborde la question des sentiers, les nouveaux propriétaires reviennent souvent comme un nœud dans la conversation. Un village de la région avait aussi son réseau de sentiers et celui-ci fut mis à mal par de nouveaux propriétaires pour qui le sens de la communauté était bien secondaire comparativement à l’idée d’avoir un grand terrain pour leur usage exclusif.
La solution à ce problème persistant réside pourtant dans l’ensemble de la communauté. L’éducation et la reconnaissance est au cœur de la pérennisation des sentiers. En effet, le PENS, une destination régionale maintenant incontournable, n’est pas de ceux qui se voient obliger de changer perpétuellement le tracé des sentiers à cause des propriétaires qui changent d’avis. Pourquoi ? Car l’intérêt de ce parc est reconnu par la collectivité, c’est aujourd’hui une évidence.
Une reconnaissance nécessaire
Un des facteurs clé du succès du Vermont est la reconnaissance des propriétaires terriens grâce à qui l’accès aux sentiers est possible gratuitement. Ces sentiers font maintenant partie de l’ADN régional et ils font le bonheur des résidents, de même que des touristes. C’est la qualité de vie de tout le monde dans la région qui s’en trouve améliorée, et ce, sans que personne ne perçoive de l’argent auprès des usagers, confirmant le caractère collectif du patrimoine naturel en place.
Il conviendrait d’adopter la même approche dans Brome-Missisquoi et de valoriser collectivement l’importance de l’accessibilité au milieu naturel sur les terres privées. Il y a plusieurs façons de s’y prendre, par exemple en sensibilisant les nouveaux propriétaires avec une documentation appropriée ou en érigeant de petits monuments au centre des villages pour reconnaître l’apport essentiel à la collectivité de ces aménagements minimalistes.
L’administration municipale de Frelighsburg montre qu’avec de la volonté, il est possible de mettre en place un réseau de sentiers local gratuit. Je tiens d’ailleurs à remercier personnellement tous les propriétaires qui ont rendu ce projet possible ! S’ils ont pu réussir cela à la grandeur du Vermont, il n’y a pas de raisons qui justifient que cela ne serait pas possible dans Brome-Missisquoi… à condition que la volonté politique soit au rendez-vous.
Anthoni Barbe