La prêle, cette survivante préhistorique
Un texte de Annie Rouleau
Paru dans le numéro Printemps/Spring 2018
Publié le : 19 février 2018
Dernière mise à jour : 31 octobre 2020
De l’ère paléozoïque demeurent quelques vestiges végétaux encore bien vivants. La prêle des champs en est un, comme les fougères et les lycopodes. Elle est utilisée par l’humain depuis, ma foi, fort longtemps et, comme tant d’autres, elle n’est l’objet que de quelques rares études cliniques plus ou moins bien documentées, donc peu crédibles pour…
De l’ère paléozoïque demeurent quelques vestiges végétaux encore bien vivants. La prêle des champs en est un, comme les fougères et les lycopodes. Elle est utilisée par l’humain depuis, ma foi, fort longtemps et, comme tant d’autres, elle n’est l’objet que de quelques rares études cliniques plus ou moins bien documentées, donc peu crédibles pour les scientifiques. Les connaissances empiriques demeurent le gage de ses qualités thérapeutiques.
De sa taille monumentale de jadis, la prêle des champs, Equisetum arvense, est aujourd’hui une petite envahisseuse de fossés et de bordures d’étangs. Elle pousse en deux étapes. Une première, fertile, où elle se dresse en tiges beige-jaunâtre segmentées, coiffées d’un épi pointu dispersant les spores reproductrices. Elle ne reste ainsi que peu de temps et laisse place à la deuxième étape, des tiges stériles d’un magnifique vert tendre, fines, droites et également segmentées, aux aisselles desquelles jaillissent de petites branches aux multiples jointures. Aucune fleur ni aucun fruit ne sont produits. D’un point de vue botanique, la prêle ne ressemble à aucune espèce connue.
Ses qualités médicinales sont principalement dues à son contenu élevé en minéraux et en oligo-éléments, particulièrement la silice, le calcium et le zinc. Elle sert aux soins du système urinaire, favorisant la production d’urine et l’élimination de métabolites et d’eau. Seule ou combinée à d’autres plantes, elle est utile en cas de rétention d’eau, d’infection et d’inflammation des voies urinaires et pour l’élimination de calculs rénaux.
La prêle étant astringente, elle aide ainsi à raffermir, voire à reconstruire les muqueuses blessées. Reins et vessie, mais aussi bouche, estomac et intestins, utérus et, bien sûr, la peau. En interne ou en applications topiques de plante fraîche ou séchée pour les bobos qui saignent et guérissent mal, la prêle est un classique de l’herboristerie traditionnelle.
Autre usage classique, la plante se retrouve dans nombre de recettes médicinales pour traiter les troubles de la prostate, encore par son action astringente et pour ses qualités anti-inflammatoires.
La prêle agit aussi sur le squelette humain. Elle augmente la disponibilité du calcium, ce qui fait d’elle une alliée importante pour la prévention et le traitement de l’ostéoporose, de fractures, de troubles des articulations. De même pour la santé des ongles et des cheveux, en usage interne et externe. La prêle est souvent combinée à l’ortie, aussi riche en minéraux. Elles forment à elles deux un puissant boost minéralisant, dynamique et facilement métabolisable par l’organisme.
Cependant, la silice est capricieuse. Il est important de récolter la prêle au début de l’arrivée des tiges stériles, soit dans les quatre semaines suivant leur apparition, après quoi la silice quelles contiennent cristallise et devient potentiellement irritante, surtout pour les reins. Par contre, les plus vieilles tiges sont utiles pour toute autre chose ; elles servent à récurer et à polir le métal et le bois. L’ancêtre de la laine d’acier, quoi !
Il convient de bien identifier l’Equisetum arvense. Certaines de ses cousines, comme les Equisetum hyemale et palustre, ont une toxicité considérable.
Pour l’infusion, mettre une généreuse cuillérée à thé de plante séchée par tasse d’eau bouillante, infuser quinze minutes, filtrer et boire d’une à trois tasses par jour. Pour extraire au maximum les composantes minérales de la prêle, la macération dans le vinaigre est idéale. Un bon vinaigre de cidre de pomme bio fait l’affaire.
Petite recette maison : Hacher les tiges en petits morceaux, en remplir (bien tassé) un pot genre Mason, couvrir de vinaigre, placer une pellicule plastique sur le goulot puis installer le bouchon. Le contact entre le métal et le vinaigre est à proscrire. Bien agiter le contenu chaque jour pour au moins la première semaine puis laisser reposer durant trois à cinq semaines dans un endroit sec à l’abri de la lumière. Ensuite, filtrer et transvider le contenu dans une bouteille de verre brun ou opaque. Renseignez-vous quant à la posologie en fonction de vos besoins spécifiques, car encore une fois, l’automédication ne devrait être pratiquée que par les gens expérimentés ou dûment formés. Sinon, consultez votre herboriste ou renseignez-vous auprès d’une personne de confiance.
La prêle ne devrait pas être prise durant la grossesse ni par des personnes souffrant de gros problèmes rénaux. Autrement, lorsque toutes les consignes sont respectées, elle ne peut que faire du bien.
Bon printemps !
Annie Rouleau
Herboriste-praticienne