Aubépine de mon cœur
Un texte de Annie Rouleau
Paru dans le numéro Printemps/Spring 2023
Publié le : 16 février 2023
Dernière mise à jour : 17 février 2023
Les feuilles, les fleurs et les fruits de l'aubépine servent à soulager les cœurs malades, les cœurs trop tristes, les cœurs brisés.
Le printemps est là. Le temps des semis aussi. Les premières fleurs percent les vestiges de l’hiver. Les bourgeons éclosent. La vie se perpétue.
Un petit arbre fleurira bientôt. Ses feuilles, ses fleurs et ses fruits servent à soulager les cœurs malades, les cœurs trop tristes, les cœurs brisés. C’est l’aubépine, Crataegus spp. Arbuste chéri des anciens païens, symbole de pureté et de protection.
En herboristerie traditionnelle, l’aubépine est considérée comme un tonique cardiaque pur. Ses composés biochimiques les plus actifs, principalement des flavonoïdes, interfèrent avec certaines enzymes, de même qu’avec quelques sites récepteurs cellulaires jouant un rôle important dans l’activité cardiaque. En gros, l’aubépine augmente la force de contraction du muscle cardiaque, elle normalise son rythme et augmente la circulation coronaire en dilatant les artères du cœur, ce qui favorise l’utilisation de l’énergie par le cœur.
L’aubépine est utilisée en prévention et en traitement des premiers stades d’insuffisance cardiaque congestive, de l’hypertension, de l’angine, de l’arythmie, de l’inflammation cardiaque ou des vaisseaux sanguins, de la mauvaise circulation dans les membres et dans l’artère coronaire, de la dégénérescence cardiaque, ainsi que de l’athérosclérose. Il est aussi d’usage d’en prendre pour reconstruire le cœur à la suite d’un infarctus. Elle favorise la dilatation des vaisseaux sanguins, particulièrement de l’artère coronaire, augmentant l’apport sanguin au muscle cardiaque. Ainsi nourri, un cœur fragile pourra plus facilement faire son travail et se reconstruire. La plante est également diurétique et antioxydante, aspects non négligeables pour le traitement de troubles cardio vasculaires.
L’aubépine agit sur le cœur physique, mais aussi sur celui, plus subtil, que les orientaux nomment le chakra du Cœur. Ce principe trouve son application dans les cas d’anxiété et d’agitation, qui s’accompagnent souvent de palpitations. La plante est également utile contre l’insomnie : elle exerce un effet calmant chez les nerveux et les fébriles.
L’aubépine agit en douceur, ce qui ne l’empêche pas d’être très efficace. Mais depuis quelques siècles, les médicaments à action rapide et plus radicale sont privilégiés. L’aubépine étant une plante « douce », elle n’a pas d’emblée une place de choix dans une médecine « agressive ». Malgré cela, un grand nombre d’études cliniques corrobore les usages courants et l’innocuité de l’aubépine. Dans la pratique traditionnelle de l’herboristerie, on privilégie l’emploi de la plante entière, par opposition à celui d’extraits standardisés. Les chercheurs pensent que les composants chimiques de la plante agissent en synergie. D’où l’intérêt de l’utiliser entière.
L’aubépine ne présente aucune toxicité et elle n’interagit avec aucun médicament. Il est cependant préférable de ne pas la combiner avec d’autres plantes cardiotoniques, surtout la digitale, Digitalis purpurea. Le commun des mortels, mais aussi les personnes faibles ou âgées, peuvent la consommer sur de très longues périodes. Il convient d’en prendre pendant au moins huit semaines. Elle agit lentement et en douceur, mais, une fois enclenchés, ses effets sont durables.
Il existe dans les commerces des teintures de fleurs, feuilles et baies d’aubépine. On prend ces macérations dans l’alcool à raison d’un à deux millilitres deux fois par jour en prévention, et de deux à trois millilitres trois fois par jour en traitement. Aussi, on peut utiliser de l’aubépine séchée. On fera mijoter les baies de trente minutes à une heure avant de les filtrer. Prendre de deux à quatre tasses par jour. Inutile de faire bouillir les feuilles et les fleurs : il suffit de les laisser infuser une trentaine de minutes dans de l’eau bouillie. Même quantité quotidienne que les baies. On peut aussi mélanger l’infusion de fleurs et de feuilles à la décoction de baies. Il suffit de mettre la partie à infuser dans la décoction de baies filtrée. Une cuillérée à table de plante séchée par tasse d’eau, toutes parties confondues. À noter que les magasins de produits naturels de la région tiennent tous diverses préparations d’aubépine.
Je me permets tout de même de dire que toute personne souffrant de troubles cardio-vasculaires doit se montrer vigilante face à son état. L’automédication ne peut se faire que si elle est accompagnée d’une parfaite connaissance des paramètres en cause. Il est préférable de consulter un professionnel de la santé afin d’évaluer correctement la situation. Notez qu’il est tout à fait possible de combiner les médicaments de synthèse à des préparations d’aubépine. Certains médecins et pharmaciens sont ouverts à cette possibilité. Autrement, consulter votre herboriste !
Bon printemps !
Annie Rouleau, herboriste praticienne, annieaire@gmail.com
Références :
Herbs for healthy aging, par David Hoffmann, éditions Healing Arts Press
Medical Herbalism, par David Hoffmann, éditions Healing Arts Press
The Energetics of Western Herbs, par Peter Holmes, éditions Snow Lotus Press