L’hiver aux épices
Un texte de Annie Rouleau
Paru dans le numéro Hiver/Winter 2021-2022
Publié le : 30 novembre 2021
Dernière mise à jour : 30 novembre 2021
Les épices de nos boissons chaudes hivernales préférées nous réchauffent de l’intérieur en stimulant le système digestif et la circulation du sang.
Pour les petites natures frileuses comme moi, l’hiver signifie mains et pieds froids pendant six mois, quatorze épaisseurs de lainages, tissus high-tech et autres laines polaires, mais surtout, beaucoup de boissons chaudes. Le grog est un représentant bien connu de ce type de breuvage, mais il tient davantage ses origines dans la prévention de l’ivrognerie chez les marins que dans l’usage médicinal qu’on pourrait en faire. Le vin chaud et le thé sont d’autres exemples de parfaites solutions réchauffantes, version liquide. Règle générale, des épices font partie de la donne. Vous aurez peut-être déjà présagé que ces épices sont toutes des plantes médicinales possédant entre autres des propriétés réchauffantes.
Ces plantes agissent en réchauffant de l’intérieur, en stimulant le système digestif et la circulation du sang, ou de l’extérieur, en augmentant l’afflux sanguin de surface. Elles ont souvent les deux actions en fait. La cannelle, la cardamome, le gingembre et la coriandre font partie de ces plantes, le romarin et le raifort aussi, sans oublier le piment fort (Capsicum spp.). Toutes ces plantes chassent le froid profond installé dans le corps, mais aussi celui plus superficiel que l’on élimine avec une bonne tasse de chaï bien chaud, les pieds devant le poêle à bois !
Prenons-les une à une. La cannelle est une des plantes les plus réchauffantes. Elle dissipe le froid interne en stimulant la circulation et la digestion. Il faut la doser minimalement, d’abord parce que son goût intense prend facilement toute la place, mais aussi parce qu’en trop grande quantité, elle peut causer un genre de crise de chaleur, où le cœur, la respiration, la digestion s’emballent, rendant l’expérience peu agréable. De tels excès arriveront plus avec l’utilisation de la cannelle en huile essentielle. Y aller une goutte à la fois ! En externe, la goutte d’huile essentielle aidera à ramener le sang et la chaleur aux extrémités.
Le gingembre mérite un texte à lui seul, ce que je ne manquerai pas de faire dans un avenir rapproché. Si vous ne le saviez pas déjà, Les Potagers des nues mains en font maintenant pousser ! C’est pour son aspect stimulant global qu’il est tout indiqué pour remonter le thermostat intérieur en cas de coup de froid. En externe, l’huile essentielle aidera aussi à ramener la chaleur aux extrémités.
Les huiles essentielles de cannelle et de gingembre ont un potentiel non pas toxique, mais plutôt dangereux. Il faut absolument les diluer dans un peu d’huile neutre ; olive, tournesol, noyaux d’abricots, etc. Les personnes de nature chaude devraient éviter de les utiliser, de même que les enfants tout petits, les futures mamans et celles qui allaitent. La cannelle et le gingembre peuvent être pris en infusion ou en décoction par ces mêmes personnes, au besoin, et en doses modérées.
La cardamome et la coriandre ne sont pas « techniquement » réchauffantes mais sans elles, le chaï ne serait pas aussi bon ! Cette boisson chaude aux multiples recettes est tout à fait parfaite pour réchauffer, stimuler et régulariser le système digestif, diminuer la production de mucus, calmer la tourmente mentale et j’en passe. La combinaison cardamome, cannelle, gingembre, graines de coriandre est une base parfaite. J’aime, personnellement, ajouter de l’anis étoilé et un peu de Cayenne, question de suer un peu plus. Ou passez chez Le Comptoir du Marchand de thé qui fait un excellent chaï !
Le romarin et le raifort sont particulièrement efficaces en cas d’engelures. Du premier, il convient de faire une décoction assez forte, à raison d’une bonne cuillérée à thé de romarin séché par tasse d’eau, mijoter à couvert et sur feu doux durant une dizaine de minutes, filtrer, tiédir, puis appliquer en compresse à l’aide d’une débarbouillette sur les zones affectées. L’huile essentielle peut aussi faire l’affaire, diluée dans une huile neutre ou un onguent de calendula ou d’arnica par exemple.
Du second, mal prise, j’utiliserais du raifort préparé vendu en épicerie, appliqué directement sur l’engelure. Mieux équipée, j’utiliserais de la racine de raifort séchée. Je la mettrais en poudre et je la mélangerais à une huile neutre, un onguent ou simplement de l’eau chaude. Juste assez pour faire une pâte facile à étaler sur un nez gelé.
Le piment fort peut, lui aussi, être utilisé comme le romarin et le raifort. Il convient de se laver vigoureusement les mains après usage et d’éviter de l’appliquer proche des yeux ! Les onguents de capsaïcine vendu dans les commerces peuvent être une alternative digne d’intérêt, question d’éviter les mésaventures.
Des articles de fond sur ces trois dernières plantes ont déjà paru dans Le Tour. Vous trouverez celui sur le raifort ici, les deux autres, parus en mai 2017 et décembre 2012, se trouvent sur mon blogue. Je vous conseille également un autre article sur les huiles essentielles réchauffantes à l’adresse suivante : www.plantes-et-sante.fr/articles/aromatherapie/3381-rechauffons-nous.
Sur ces descriptions succinctes de plantes extraordinaires, je vous souhaite bonne lecture et un superbe hiver.
Annie Rouleau
Herboriste praticienne