Le framboisier du mont Ida

Il y a très longtemps, la nymphe Ida avait pour charge de s’occuper de Zeus, encore enfant, mais sujet à des caprices et à des colères monumentales. Il était impératif de trouver des solutions pour adoucir son caractère, car il ne ferait pas un très bon dieu des dieux, avec en main le ciel, la lumière et la foudre, s’il demeurait incapable de contrôler ses humeurs ! Ida gravit donc le mont à côté de chez elle et ramena à Zeus les fruits délicieux du framboisier. L’enfant, touché par la délicatesse des fruits et de sa nourrice, parvint à s’apaiser ! Ainsi, le framboisier est devenu un symbole de réconfort, de calme, de pondération et d’amabilité. Depuis, le mont et l’arbrisseau portent le nom de la nymphe Ida, le mont Ida en Crète et le Rubus idaeus, aujourd’hui présent dans les zones tempérées et froides de la planète Terre. Merci, Zeus !

Le framboisier est un précieux allié. De manière générale, il est astringent, nutritif, il tonifie les organes génitaux et toute la région pelvienne et il est vulnéraire, donc il supporte la guérison des plaies. De façon plus spécifique, le framboisier est utilisé pour les troubles du système reproducteur des femmes et des hommes, des systèmes digestif, urinaire, respiratoire supérieur et de la peau. En fait, lorsqu’on parle d’astringence comme propriété médicinale d’une plante, on réfère directement aux muqueuses du corps. L’astringence résulte des tannins contenus dans les plantes. Le framboisier est donc riche en tannins, ainsi qu’en vitamines et en minéraux facilement assimilables.

Pour les femmes, le framboisier est « la » plante de base pour les troubles de l’utérus, pour la grossesse et l’accouchement. Il nourrit, tonifie et relaxe le muscle utérin, aidant ainsi tous les troubles en lien, comme les crampes menstruelles, l’endométriose, les fibromes, mais aussi l’accouchement, en diminuant la puissance des douleurs des contractions. Il prépare l’utérus, il calme les nausées, apporte plein de nutriments, supporte la lactation et la récupération post-partum. On l’utilise aussi pour diminuer l’impact d’une interruption de grossesse, désirée ou non. Ces usages du framboisier sont empiriques, datant donc depuis aussi longtemps que la légende de Zeus. Certains le déconseillent durant la grossesse. Si vous craignez, attendez le deuxième trimestre avant de l’intégrer ou consultez votre herboriste !

De plus, le framboisier est utilisé pour plusieurs autres troubles de la région pelvienne, notamment pour les troubles de vessie comme l’irritation ou la menace de ptose, en cas de difficultés urinaires. La plante peut aussi servir les hommes aux prises avec une hypertrophie bénigne ou une inflammation de la prostate. Je répète, consultez sans hésitation pour tout trouble inquiétant ! Utiliser des plantes médicinales pour se soigner, c’est aborder le corps et la santé sous un angle différent de celui proposé par la médecine officielle. C’est un peu comme regarder un paysage allongé sur le côté plutôt que debout, les deux points de vue sont différents, mais n’enlèvent rien à l’autre.

De par son astringence encore, le framboisier est aussi utilisé pour les systèmes digestif et respiratoire. Il aide autant en cas de diarrhée que de constipation légère, pour les maux de ventre même chez les enfants, pour les troubles intestinaux comme les diverticules enflammés, les indigestions. Ici encore, il supporte la muqueuse et son intégrité. Son apport en minéraux et vitamines, dont A et C, supporte l’immunité. Pour les inflammations de la bouche et de la gorge, genre amygdalite et laryngite, les extinctions de voix, en combinaison avec d’autres plantes associées, comme le sapin ou la myrrhe.

Dernière chose, la peau. Pour les blessures, brûlures, éruptions cutanées. Pour les yeux ; conjonctivites, orgelets. Ici aussi, le combiner à d’autres plantes aidant la peau est une bonne idée, comme le plantain ou la calendule.

Pour bénéficier des propriétés de cette plante bisannuelle, on utilise les feuilles récoltées avant la floraison sur des plants de deuxième année, ou à la fin de la saison sur des tiges de première année. La première option fournira davantage de tannins. On les transforme fraîches en teinture ou en vinaigre, à raison d’une part de plante pour trois parts d’alcool ou de vinaigre. Les feuilles de framboisier sèchent facilement sur leurs branches suspendues à l’envers dans un endroit sombre et aéré, ou sur un cadre à moustiquaire. Elles se détacheront facilement de la tige une fois séchées. En infusion courte ou longue, pour plus ou moins de tannins, de 3 à 15 grammes de plante séchée par jour. Privilégier l’infusion longue pour l’application externe, compresses ou bains d’yeux, de siège, de gorge.

Un heureux printemps, je vous souhaite !

Annie Rouleau, herboriste praticienne

annieaire@gmail.com