Les plantes sauvages comestibles du printemps

Un texte de Annie Rouleau

Paru dans le numéro

Publié le : 25 février 2019

Dernière mise à jour : 1 novembre 2020

 

Après les jolis, mais longs mois d’hiver, la douceur du printemps fait revivre les gens qui, comme moi, apprécient moins la neige et le froid. J’aime mieux gambader dans les champs, malgré les tiques. Il est aussi plus facile de se nourrir de produits frais par trente degrés au-dessus qu’au-dessous de zéro. Comme je ne…

Après les jolis, mais longs mois d’hiver, la douceur du printemps fait revivre les gens qui, comme moi, apprécient moins la neige et le froid. J’aime mieux gambader dans les champs, malgré les tiques. Il est aussi plus facile de se nourrir de produits frais par trente degrés au-dessus qu’au-dessous de zéro. Comme je ne suis pas tellement jardinière, j’affectionne les plantes sauvages comestibles et, croyez-moi, la liste est longue et offre une variété exceptionnelle et disponible, sinon à travers le trèfle de nos pelouses, à tout le moins dans les espaces ouverts des lieux sauvages. Je vous propose d’en explorer quelques-unes, les printanières d’abord, celles plus estivales et automnales dans le prochain numéro.

Les nouvelles feuilles de moutarde sauvage, de chou gras, de petite oseille et d’oxalide sont magnifiques entières ou hachées finement, seules ou accompagnant une laitue. Elles sont toutes quatre un peu piquantes, surettes dans le cas de l’oseille et de l’oxalide. Ces dernières parfument superbement les salades de pommes de terre.

Dans la catégorie des amères, le pissenlit, la chicorée et la laitue sauvage, en plus petites quantités pour ceux qui aiment moins le goût. Les premières rosettes de barbarée vulgaire, entrent aussi dans cette catégorie. L’élément amer est important pour bien démarrer la cascade digestive, ce qui rend ces plantes idéales pour les cures printanières.

Achillée millefeuille

L’achillée millefeuille

Les feuilles de marguerite, cueillies lorsque la plante est en rosette puis hachées finement, complètent délicieusement une salade. Celles de l’achillée millefeuilles aussi. Les jeunes feuilles d’ortie, bien sûr ! La cuisson neutralise l’effet urticant de la plante. La soupe à l’ortie est probablement la façon la plus simple de l’apprêter. L’utiliser alors comme le cresson. Il est aussi possible d’en faire une mixture pouvant être intégrée à une préparation de pâtes ou de gnocchis maison.

Une autre foule de plantes sauvages géniales et communes peut entrer dans nos recettes, des plantes souvent envahissantes ou peuplant trop intensément certains environnements.

Une toute belle aux fleurs parfumées, l’asclépiade 1. Ses boutons floraux se mangent comme des brocolis. Les bouillir quelques minutes, changer l’eau puis répéter permet d’éliminer l’amertume du latex de la plante. On peut aussi les blanchir une fois puis les poêler dans un corps gras. Les jeunes pousses de l’asclépiade se mangent comme des asperges. Il convient de les récolter lorsqu’elles atteignent vingt centimètres de haut en coupant près des racines. Peler la tige, rincer puis cuire vapeur ou dans deux eaux pour réduire l’amertume.

Annie Rouleau

Le galinsoga

Même chose pour la renouée du Japon, ce grand roseau si détesté, mais ô combien merveilleux. De plus, récolter les pousses de renouée semble, d’après mes recherches, être la seule réelle façon de contrôler les colonies. On les pèle puis on les cuit vapeur jusqu’à ce qu’elles soient tendres. Elles peuvent être servies chaudes avec quelques noix de beurre, du sel et du poivre, ou tièdes nappées de votre vinaigrette préférée. Une dernière dans cette catégorie, la quenouille. Ses jeunes pousses se préparent aussi comme les asperges. Je reviendrai sur celle-ci dans mon prochain texte. Deux autres, moins connues, mais aussi intéressantes, les toutes nouvelles pousses de silène pétard et de galinsoga se mangent cuites, vapeur ou bouillies, ou encore au four avec un peu d’huile et des aromates, à nouveau comme les asperges. Une recette2 avec le silène, transposable à plusieurs des plantes nommées ci-haut.

Grande bardane

La bardane

Quelques racines ! La grande bardane. Sa racine est exceptionnelle d’un point de vue nutritionnel, sa récolte est proportionnellement ardue. Elle peut s’allonger sur beaucoup de centimètres dans le sol et si celui-ci est le moindrement bien tassé, vous allez rager. Privilégiez peut-être les endroits où le sol est sablonneux, meuble. Mais l’effort en vaut la peine. On peut la préparer en soupe, l’ajouter à des bouillis de légumes et viande, la braiser lentement, en faire des purées, bref, elle est géniale. Idem pour la racine d’onagre bisannuelle. Exemple, peler les racines récoltées puis les blanchir dans une eau salée. Ensuite, incorporez-les à un râble de lapin braisé ou à une tourtière du Lac, mais attention, il se peut que vous créiez ainsi un précédent familial ! Ce sont des idées, votre imagination fera le reste !

onagre

L’onagre

Notez que la bardane et l’onagre sont des bisannuelles. Il est donc important de récolter leurs racines soit tôt au printemps de leur deuxième année, soit à l’automne de leur première année, sinon elles seront vides de leur chair et de leur valeur nutritive, celles-ci étant alors mobilisées à produire des fruits ou pour survivre à l’hiver.

Comme il est absolument primordial de bien identifier les plantes avant de les consommer, je vous suggère, pour celles que vous connaissez moins, de penser cette année à les localiser et à les marquer au besoin. Vous serez ainsi plus à l’aise et pourrez commencer les dégustations au prochain printemps. Si vous récoltez, assurez-vous de respecter l’éthique de récolte : votre passage doit passer inaperçu, pour la plante et pour les suivants.

Dernière chose, récoltez des feuilles de tussilage et séchez-les adéquatement. J’ai une recette pour vous dans le prochain numéro du journal.

Annie Rouleau

Herboriste praticienne

annieaire@gmail.com

1 Voir les archives du journal pour les textes relatifs à ces deux plantes

2 http://tramezzinimag2.blogspot.com/2013/04/merveilles-printanieres-le-risotto-aux.html

Références

Plantes sauvages au menu, 2e édition ÓGroupe Fleurbec 2005)

Recherches sur les utilisations culinaires et médicales des plantes du Québec, par Sylvie Gauthier & Richard Charette ÓCégep de Baie-Comeau, 3e impression 2004)

The Edible Wild, par Berndt Berglund & Clare E. Bilby ÓPagurian Press Limited 1974, A Christopher Ondaatje publication)

La Flore laurentienne, par Frère Marie-Victorin ÓLes presses de l’Université de Montréal 1964-1995)